Niché au cœur du Grand Mazarin, le nouvel hôtel qui fait bruisser le tout Marais pour sa décoration baroque et exubérante, le restaurant Boubalé s'impose, depuis son ouverture à l'automne 2023, comme l'endroit inédit que Paris attendait ! Inédit parce que l'on y découvre la cuisine ashkénaze remastérisée par le chef Assaf Granit qui transforme en hype tout ce qu'il touche. Inédit parce que la décoration qui vous transporte dans une datcha d'Europe de l'Est (alors que se dresse juste en face le BHV!) est un voyage instantané dans un pays imaginaire, coloré et joyeux. Inédit parce que l’accueil décontracté et chaleureux, attentionné et amical est une rareté dans ce quartier du 4ème arrondissement où les « adresses à touristes » ne sont pas toujours très recommandables. Bref, Boubalé est une surprise douce et acidulée...et un nouveau restaurant israélien de Paris plus que recommandable.

 

Pour l'anecdote, Boubalé signifie « ma petite poupée, ma petite chérie » en yiddish, expression favorite des grands-mères ashkénazes dont la cuisine a été ici magnifiée par le chef Assaf Granit. Lui qui est déjà à la tête de plusieurs restaurants à Jérusalem, sa ville natale, et à Paris (avec son restaurant gastronomique à Paris une étoile au Michelin : Shabour) et qui est la figure iconique de la nouvelle cuisine israélienne, s'est attaqué avec Boubalé à un vrai défi : rendre sexy et glamour les plats mythiques de la cuisine ashkénaze, si modeste et si méconnue ! Si les parisiens ont désormais l'embarras du choix quand ils veulent s'attabler devant des plats de la cuisine du Levant, l'autre face de la cuisine juive venant de la communauté séfarade, il n'en était pas de même pour la cuisine ashkénaze. Avec Boulabé, cette « injustice » est désormais résolue. Et autant vous dire que même les gourmets les plus avertis sont désappointés à la lecture de cette carte qui propose des plats que l'on n'a pas souvent la chance de se mettre sous la dent ! Pousser la porte de Boubalé et s'y attabler est donc l'assurance d'être surpris...

 

Le voyage débute avec le choix des pains. Du « frenavon » qui s'apparente à une grosse boule de pain de campagne accompagnée d'un tahini de betterave ou du challah, soit une grosse brioche, que l'on trempe dans une crème de sumac et de tomates ? Dans le doute, prenez les deux ! Ils seront parfaits pour accompagner les entrées qui arrivent en petites portions. On a adoré le « grave-laks » de saumon, arak, aneth, pickles de moutarde et câpres frits. Tout comme les betteraves rôties, feta et raifort (selek-svekla pour les initiés). L'iconique pâté de foie de volaille qui est un incontournable de la cuisine juive de l'Est de l'Europe est lui proposé dans sa version originale (avec quelques oignons caramélisés et du poivre noir, des croutons et des cornichons). Mais si le goût est conforme à ce qu'il doit être, c'est le service qui surprend puisqu'il est présenté dans une grande louche, comme si votre grand-mère ashkénaze l'avait directement pioché dans la terrine familiale. On adore l'idée !

 

On a été moins séduit par les « petites pochettes » soit des raviolis à la façon de ceux que l'on trouve en Pologne, par exemple. Si le chef a eu la bonne idée d'alléger la recette originale qui est plus que nourrissante, les deux variantes proposées (bœuf ou agneau) sont un peu trop goûteuses pour les papilles peu habituées à ces saveurs et textures. Mais, après-tout, cette cuisine ashkénaze demande à être apprivoisée pour en appréhender toutes les subtilités. En revanche, le goulasch de joue de bœuf, paprika hongrois, amandes et (étonnement) du parmesan s'est révélé être délicieux et malicieusement modernisé par l'ajout de gnocchis frits. Un plat addictif. Très bien aussi et hautement dépaysant le « kneidalach » de fruits de mer. Soit des matza balls de homard qui flottent avec moules et crevettes dans un bouillon... de poulet ! Voilà vraiment un plat étonnant à l'image de toute la carte de Boubalé qui surprendra les gourmands les plus blasés ! 

 

Pour ce qui est de la touche sucrée, outre un strudel, on a aimé la « babka benimousse » plus qu'addictive puisqu'il s’agit d'une onctueuse mousse au chocolat noir, nappée d'huile d'olive et saupoudrée de sel, que l'on pose sur une tranche de brioche. C'est l'un des desserts signature d'Assaf Granit que l'on retrouve dans beaucoup de ses restaurants et l'on comprend pourquoi tant c'est délicieux !

 

Bref, chez Boubalé la cuisine est joyeuse et peu commune. Tout comme la décoration à base de meubles en bois peints et de banquettes en velours, d'assiettes accrochées au mur et de verres de cristal gravés à la main, de papier peint audacieux et de fresques colorées. Ajoutez une bande son festive, un service qui entraîne les convives très tard dans la nuit (une rareté à Paris que l'on ne peut que saluer), un bar proposant des cocktails aux saveurs végétales inédites et, bientôt, un cabaret secret pour terminer la nuit. Et vous aurez le portrait d'un restaurant unique en son genre qui vous assure une soirée digne des Balkans, soit inattendue et surprenante !

 

Côté tarifs, comptez entre 16 et 28 euros pour les entrées, 26 et 38 euros pour les plats, 12 à 17 euros pour les desserts. Une belle carte de vins, dont certains au verre venant d’Europe de l'Est (vendus un poil trop cher) et des cocktails inventifs complètent l'offre du Boubalé.

 

Boubalé dans l'hôtel Le Grand Mazarin
17 rue de la Verrerie
75004 Paris
legrandmazarin.com