Lorsque l'on pousse la porte du Melville, on sent d'emblée que l'on est dans une adresse d'amateurs. D'amateurs de films noirs français de la grande époque sous l'égide de Jean-Pierre Melville qui a donné son nom au lieu. D'amateurs de jazz et autres musiques groovies puisque l'on est ici dans un club qui programme, chaque soir, de la musique live. Et même d'amateurs de bonne cuisine et de belles bouteilles lorsque l'on s'attable et que l'on découvre la cuisine inventive du jeune chef Malcom Ecolasse...

Le Melville se situe dans une petite rue du 8ème arrondissementà quelques minutes des Champs-Élysées, et juste à côté d'un voisin plutôt bruyant (à l’intérieur) puisque le Piaf, cette table festive, resto et piano bar qui attire à lui la jeunesse dorée (ou plutôt leurs parents !) des beaux quartiers, se trouve sur le même trottoir. Un voisinage qui peut avoir un intérêt. Pour ceux qui veulent bien manger, sans être assommés par des prix déraisonnables et écouter de la bonne musique, il leur suffit de poursuivre quelques pas pour snober ce piaf sans grand intérêt pour aller pousser la porte du Melville. Ceux-là auront la certitude de trouver musique et bonne chère là où le médiatique voisin n'offre de bruit et petite tambouille !

Bref, le Melville est sans doute la meilleure antithèse à son voisin et illustre que l'on peut proposer une cuisine inspirée dans un lieu où l'on vient aussi pour s’amuser et écouter de la musique ! Le repas débute avec la carte des cocktails qui est large et inventive. Les cocktails sont baptisés du nom des films de Jean-Pierre Melville (Le cercle rouge, le Doulos, Léon Morin...) et sont tous délicieux, raffinés, inventifs. Lorsque l'on ouvre la carte des petits plats de partage qu'a concocté le chef, on s'interroge sur les libellés qui sont sibyllins. Ils demandent une explication que l'on vous apporte volontiers entre deux notes de jazz distillées par des musiciens qui sont placés au cœur du restaurant, juste devant votre table.

Le « maki M28 » est donc une étonnante chips blanche dans laquelle se dissimule des petites bouchées de thon recouvertes par une écume crémeuse. Délicieux. Le poulpe chimichurri arrive snacké et reposant sur une purée de potimarron. Mais c'est la sauce chimichurri addictive qui donne toute sa saveur à ce plat gourmand. On aime aussi beaucoup le « retour de forêt », soit de grosses ravioles végétales accompagnées de petits champignons et la « japchouka », une revisite de la chakchouka à base de petits légumes confits. Une évocation orientale que l'on retrouve dans la « mer-guez », soit l'étonnante alliance d'un effiloché d'agneau déposé sur une baguette, recouverte de fromage gratiné et accommodé avec... des framboises et des salicornes ! Etonnant mais ça fonctionne plutôt bien !

Ce jeune chef, Malcom Ecolasse, compose sa cuisine comme un jazzman sa partition de free jazz : avec une grande liberté et beaucoup d'inventivité. Il faut reconnaître que cela marche. Même côté desserts avec un mille-feuille à la cacahuète ou une barre chocolatée régressive. Autant de petits plats que l'on partage avec son cocktail ou son verre de vin en écoutant des musiciens s’éclater en partant dans un « boeuf » de tous les diables. Le tout dans une atmosphère cosy et élégante, lumières tamisées et assises en velours. Bref, le Melville a tout pour devenir le QG de ceux qui aiment le cinéma d'hier, la musique de toujours et la cuisine d'aujourd'hui, cosmopolite et métissée mais parfaitement maîtrisée.

Depuis l’automne 2023, le Melville ouvre aussi pour le déjeuner. Le soir comptez entre 12 et 24 euros par plat. Des tarifs très raisonnables puisque l'on assiste aussi à un concert en dinant... 


Le Melville
28 rue Jean Mermoz, 75008 Paris
lemelville.fr